Une Musique Perdue d'Écosse Révélée : Ce Que Vous Ne Saviez Pas sur le Son du Moyen Âge !

Fragment de musique du Breviaire d'Aberdeen : Volume 1 ou "Pars Hiemalis". Image fournie par la Bibliothèque nationale d'Écosse. Crédit : Bibliothèque nationale d'Écosse et utilisable sous la licence Creative Commons Attribution 4.0 International. Lien pour les téléchargements et informations complémentaires : https://digital.nls.uk/aberdeen-breviary/archive/102878258?mode=fullsize.

Un fragment de musique "perdu", retrouvé dans les pages du premier livre imprimé en Écosse, apporte des indices sur la sonorité de la musique il y a cinq siècles.

Des chercheurs de l'Édimbourg College of Art et de l'Université KU Leuven en Belgique ont exploré l'origine de cette partition musicale, qui ne contient que 55 notes, afin de mieux comprendre la musique pré-réforme de l'Écosse au début du XVIe siècle.

Ecoutez la musique !


Selon les chercheurs, cette découverte fascinante constitue un exemple rare de musique provenant des institutions religieuses écossaises d'il y a 500 ans et représente la seule œuvre qui subsiste du nord-est de l'Écosse datant de cette période. Les résultats ont été publiés dans la revue Music & Letters.

Les chercheurs ont fait cette découverte dans un exemplaire du Breviaire d'Aberdeen de 1510, un recueil de prières, cantiques, psaumes et lectures utilisés pour le culte quotidien en Écosse, et contenant des écrits détaillés sur la vie des saints écossais. Connu sous le nom de "copie de Glamis", car il appartenait autrefois au château de Glamis, il est désormais conservé à la Bibliothèque nationale d'Écosse à Édimbourg.

Bien que la partition musicale ne comporte ni texte, ni titre, ni attribution, les chercheurs l'ont identifiée comme une harmonisation musicale unique du Cultor Dei, un hymne chanté la nuit pendant le Carême.

Le Breviaire d'Aberdeen fait partie d'une initiative du roi Jacques IV, qui avait accordé un brevet royal pour imprimer des livres contenant des ordres de service conformes aux pratiques religieuses écossaises, évitant ainsi de dépendre des textes importés d'Angleterre ou d'Europe.

Les chercheurs estiment que la composition provient de la région de l'Aberdeenshire, avec des liens probables avec la chapelle de Sainte-Marie de Rattray, située à l'extrémité nord-est de l'Écosse, ainsi qu'avec la cathédrale d'Aberdeen.

La découverte a eu lieu lors de l'examen de nombreuses annotations manuscrites dans les marges de la copie de Glamis. L'objet principal d'intérêt pour les chercheurs était un fragment de musique, réparti sur deux lignes, la seconde étant environ deux fois plus courte que la première, trouvé sur une page vierge dans une section du livre dédiée aux Matines, un service du matin.

La présence de cette musique a intrigué l'équipe. Elle ne faisait pas partie du livre imprimé original, mais était écrite sur une page intégrée au livre, ce qui suggère que l'auteur souhaitait garder la musique avec le texte. En l'absence d'annotations textuelles sur la page, il n'était pas évident de savoir si la musique était sacrée, profane ou même destinée à des voix.

Après investigation, les chercheurs ont déterminé qu'il s'agissait d'une œuvre polyphonique, où deux ou plusieurs lignes indépendantes de mélodie sont chantées ou jouées en même temps. Des sources de l'époque indiquent que cette technique était courante dans les institutions religieuses écossaises, mais très peu d'exemples ont survécu jusqu'à aujourd'hui.

En examinant de plus près, l'un des membres de l'équipe a réalisé que la musique correspondait parfaitement à une mélodie de chant grégorien, spécifiquement à la partie de ténor d'un faburden, une harmonisation musicale à trois ou quatre voix de l'hymne Cultor Dei.

David Coney, de l'Édimbourg College of Art, qui a découvert l'identité de la musique, a déclaré : "Identifier une pièce musicale est un véritable moment 'Eureka' pour les musicologues. Mieux encore, le fait que notre partie de ténor soit une harmonie d'une mélodie bien connue nous permet de reconstruire les autres parties manquantes. Ainsi, à partir d'une simple ligne de musique griffonnée sur une page vierge, nous pouvons entendre un hymne qui était resté silencieux pendant près de cinq siècles, un petit mais précieux vestige des traditions musicales et religieuses de l'Écosse."

En plus de découvrir les sons perdus dans ses pages, les chercheurs ont également retracé l'histoire de l'utilisation de ce Breviaire d'Aberdeen et les personnes qui en ont fait usage au cours de son histoire. Il aurait été un temps utilisé comme livre de service privé par le fils illégitime d'un chapelain de haut rang à la cathédrale d'Aberdeen, lui-même prêtre rural. Plus tard, il serait devenu un précieux héritage familial d'un catholique écossais dont les voyages l'ont mené de l'Écosse post-réforme aux capitales des empires Habsbourg et ottoman.

L'auteur principal, le Dr Paul Newton-Jackson, de l'Université KU Leuven, a déclaré : "Les conclusions que nous avons pu tirer de ce fragment soulignent le rôle crucial des marginalia comme source de nouveaux éclairages sur la culture musicale, là où peu de matériaux notés ont survécu. Il est fort possible que d'autres découvertes, musicales ou autres, attendent encore dans les pages vierges et les marges d'autres livres imprimés du XVIe siècle conservés dans les bibliothèques et archives d'Écosse."

En 2023, le Dr Newton-Jackson était également chercheur post-doctoral à l'Institut d'études avancées en sciences humaines de l'Université d'Édimbourg.

Le Dr James Cook, de l'Édimbourg College of Art, a ajouté : "Pendant longtemps, on a cru que l'Écosse pré-réforme était un désert en matière de musique sacrée. Notre travail montre qu'en dépit des bouleversements de la Réforme, qui ont détruit une grande partie des preuves évidentes, il existait une forte tradition de musique de qualité dans les cathédrales, églises et chapelles écossaises, tout comme ailleurs en Europe."

Sources : Université d'Édimbourg.

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